LE RENOUVEAU 354
DU DIMANCHE 09 AVRIL 2000
Organe d'information du PRD

Diffusion par l'ARDHD
Directeur de publication : Daher Ahmed Farah
Rédaction - Administration :
Edité par la Commission Communication du Parti
Avenue NASSER tel :35 14 74 B.P : 3570
Tirage : 1500 exemplaires . Dépôt Légal N°365

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LE RENOUVEAU


N° 354 DU DIMANCHE 09 AVRIL 2000


Information

Si le ridicule tuait...

Fin mars 2000. Le pays entre en effervescence à l'annonce du retour du président du Front pour la Restauration de l'Unité et de la Démocratie (FRUD), signataire de " l'accord-cadre de réforme et de concorde " du 7 février à Paris.

Le président Dini et sa délégation reviennent donc au pays, après une longue absence de neuf ans pour cause de résistance armée à l'autocratie régnante. Ils rentrent en parfait accord avec les autorités en place.

Le journaliste Ali Barkad Siradj, qui assure alors par intérim les fonctions de rédacteur en chef du journal gouvernemental la Nation, juge tout à fait de son devoir d'annoncer cet événement national. Il passe à l'acte et rédige un entrefilet, pour l'édition du lundi 27 mars 2000, où il informe lecteurs et lectrices du retour du président Ahmed Dini Ahmed et de sa délégation.

L'article, très bref, est intitulé " La paix des braves ".Objectif, il se borne à inscrire cet événement dans l'accord-cadre du 7 février 2000 à Paris et à rappeler fort sommairement quelques éléments d'information sur le parcours politique du président Ahmed Dini Ahmed et de son vice-président Chehem Daoud Chehem. Rien de tendancieux ni même de laudatif donc.

Pourtant, cela déplaît instantanément au Secrétaire Général à l'Information, par ailleurs directeur de publication du journal la Nation, qui sort de ses gonds. Prévenu en pleine nuit (par quelque âme fidèle, semble-t-il), il débarque sur les lieux de travail en deux temps, trois mouvements, et vide sa colère sur la journaliste en chef auteur de l'article. Que le journaliste ait pris l'initiative (des plus professionnelles) d'annoncer cet événement imminent dans une édition à paraître la veille (en réalité l'avant-veille en raison d'un changement de dernière minute), sans lui en référer et en soumettre ensuite (en cas de feu vert, s'entend) chaque phrase ainsi que chaque mot à sa censure, voilà qui est grave, très grave même, à ses yeux. Cela dénote, c'est clair pour le chef hiérarchique, un parti-pris pour l'opposition de la part du journaliste. Ce que, selon nos informations, il ne se prive point de le crier sur le champ. Avant de faire retirer l'entrefilet de l'édition à paraître, ne soufflant ainsi mot sur le retour du président Ahmed Dini Ahmed et de sa délégation. Heureusement qu'il y à Le Renouveau et les communiqués de l'ODU pour s'en charger.

Stupéfait, le journaliste, l'un des meilleurs de la maison, s'est donc exécuté et a ôté du journal l'article en question. Mais il n'est pas, pour autant, au bout de ses surprises. Dès le 29 mars 2000, c'est-à-dire dès le jour du retour de la délégation du FRUD, il se voit remettre une " demande d'explication " du Rédacteur en chef en titre de la Nation qui lui demande de s'expliquer sur " son acte"

Il lui demande de lui expliquer " les raisons pour lesquelles il a tenté de publier un article tendancieux de nature à nuire aux accords de paix auxquels le gouvernement est parvenu. De plus, écrit-il, votre acte est aggravé par la terminologie utilisée dans votre article, lequel ne comportait pas votre signature, était sensé semer le doute dans l'esprit de nos lecteurs et ainsi jeter les discrédit sur le journal "

Devant de telles affirmations, l'on ne peut que rester coi de stupéfaction. A moins d'être anormalement constitué, l'on ne voit pas en effet en quoi ce bref article pourrait nuire aux " accords de paix auxquels le gouvernement est parvenu ". Lisez-le plutôt dans son intégralité et jugez-en:

" Le président et le vice-président du FRUD M .Ahmed Dini et M. Chehem Daoud sont attendus à Djibouti le 28 mars 2000, c'est-à-dire demain. Ce retour au pays des dirigeants du mouvement armé fait suite à l'accord-cadre de cessation des hostilités signé à Paris avec le Gouvernement le 7 février 2000.

Monsieur Ahmed Dini, qui fut dans les années 70 l'un des principaux acteurs de la lutte pour l'indépendance, a occupé en 1977 le poste de premier ministre dont il a démissionné avec panache six mois seulement après sa nomination. Il est à la tête du FRUD depuis 1992.

Quant à M. Chehem Daoud ancien ministre de la Santé du gouvernement Aref, il est numéro deux du FRUD depuis 1994.

Cet accord de paix ouvre donc la voie à un règlement définitif du conflit interne déclenché en 1991 ".

L'on a beau lire et relire cet article, rien n'apparaît qui soit susceptible de " nuire aux accords de paix ", ni de" semer le doute dans l'esprit des lecteurs ", encore moins de " jeter le discrédit sur le journal ". Tout ce qui y est écrit est vrai, y compris la date du retour qui, au moment où l'article est écrit, n'a pas encore changé pour se fixer au mercredi 29 mars 2000.

Monsieur Dini et son vice-président n'étaient-ils pas attendus à Djibouti ? Leur retour n'était-il pas officiel, annoncé notamment par l'Opposition Djiboutienne Unifiée (ODU) et par le journal le Renouveau ? Ce retour au pays ne fait-il pas suite à l'accord-cadre de concorde et de réforme signé à Paris le 7 février 2000 entre le gouvernement et le FRUD représenté par ces mêmes Ahmed Dini et Chehem Daoud ? M. Dini n'a-t-il pas été dans les années 1970 l'un des principaux acteurs de la lutte pour l'indépendance, aux côtés de M. Hassan Gouled Aptidon ? N'était-il pas en première ligne en ces temps-là dans le combat pour l'indépendance ? N'était-il pas avec Gouled à la tête de la LPAI ? N'était-ce pas lui que nous applaudissions abondamment dans les manifestations et autres meetigs de la LPAI ? Ne criions-nous pas :" Waa Dini iyo Dinta : c'est Dini et Dinta (la réligion en somali) " ? Avec tout ce que cela comporte de connotation positive. N'a-t-il pas été en 1977 et pendant six mois, le premier Premier Ministre de la République ? N'a-t-il pas, avec courage, démissionné de ce poste dès qu'il perçu les prémices de la future confiscation autocratique de l'Etat ?

Quant à Chehem Daoud, n'a-t-il pas été membre du gouvernement Aref avec le portefeuille de la Santé ? N'est-il pas vice-président du FRUD depuis plusieurs années maintenant ?

Et cet accord-cadre, n'a-t-il pas pour raison d'être même de mettre fin au conflit armé en restaurant la paix civile, la concorde nationale et la démocratie sans lesquelles il ne peut y avoir de développement ? Ne sont-ce pas là ses objectif clairement affirmés ?

Décidément, l'auteur de la " demande d'explication " est à mille lieues de convaincre du bien fondé de sa réaction. Il donne l'impression de se gargariser de mots sans prise aucune sur la réalité ?

Mais au fait, qui est derrière cette sortie contre l'accord-cadre de Paris, car ce n'est point le journaliste culpabilisé, qui n'a fait que son travail, mais ceux qui le lui reprochent qui nuisent aux " accords de paix auxquels le gouvernement est parvenu " ? S'agit-il là de la simple exécution d'une instruction venue du sommet de l'Etat ou de l'initiative de quelque chefaillon craignant pour ses petits privilèges ?

Ce sont là des questions qui méritent réponses de la part de qui droit.

A suivre.




ECONOMIE



LA CONTREBANDE S'AMPLIFIE A NOS FRONTIERES



La contrebande apparaît où l'économie va mal. C'est l'un des symptômes d'un Etat malade où les agents économiques trouvent plus avantageux de tourner la loi pour toutes sortes de raisons. Symptôme, elle est aussi alerte et doit comme telle interpeller les décideurs.


Dans notre pays, la contrebande a toujours été un phénomène insignifiant. Elle s'opérait plutôt, quand elle apparaissait, depuis le territoire national vers les pays limitrophes. Signe que nos produits et nos prix étaient jugés intéressants par les ressortissants voisins qui leur faisaient franchir les frontières en contrebande pour éviter la taxation.

Depuis quelques temps maintenant, précisément depuis que notre économie est en crise et nos produits chers du fait de l'inflation fiscale, le phénomène s'est inversé. C'est vers nous que viennent les marchandises de contrebande. Du Somaliland voisin mais aussi d'Ethiopie.

La contrebande a pris une telle ampleur que le gouvernement a fini par en reconnaître l'existence, allant jusqu'à mettre en place un dispositif de lutte contre cette pratique. Dispositif regroupant les ministères de l'Economie et des Finances, de la Défense, de l'Intérieur et de la Justice. Le ministre de l'Intéreur s'est même transporté récemment à la frontière avec le Somaliland, où la contrebande s'est très développée ces temps-ci. Toutes sortes de marchandises nous proviennent de l'Etat auto-proclamé, depuis les cigarettes jusqu'au carburant en passant par les produits de beauté. Et l'on ne compte plus les accrochages violents (à l'arme à feu) entre les contrebandiers et les forces de police chargées de la réprimer. Pas plus tard qu'il y a quelques jours, un véritable combat a opposé policiers et contrebandiers armés du côté de Chabelley.

Face au problème, le ministre de l'Intérieur, nous apprend la Nation du 5 avril 2000, a exhorté la population de la région frontalière côtière du Sud (Doudah-Damerjog-Atar-Loyada) à faire preuve de vigilance et de civisme. Il s'est contenté de cette exhortation, aurait dû écrire la Nation, car le problème est trop grave pour être traité par le seul verbe. Si le ministre s'imagine qu'il suffit d'aller prêcher la bonne parole, au volant de sa rutilante grosse cylindrée et dans une mise luxueuse, à une population à bout de souffle à force de misère, il se fourvoie lourdement.

Interrogé par Le Renouveau, un habitant de la région a eu ces mots : " Ils viennent, puant l'argent public, oser nous donner des leçons de civisme, à nous autres que leur mauvaise gestion accable de misère. Comme le dit le proverbe djiboutien, ce n'est pas par hasard si la marmite vient à ébullition ".

La contrebande n'est pas tombée du ciel ni sortie de terre, elle a des causes objectives qu'il faut avoir le courage d'admettre et de traiter. Il y a contrebande parce qu'il y a demande. Le corps social -paupérisé à force de chômage, de baisses et de retards de salaires (surtout dans le secteur public)- n'arrive plus à acquérir sur le marché local des produits sans cesse plus chers du fait de la hausse des taxes. Il cherche alors d'autres sources, accessibles à ses maigres ressources, d'où la contrebande. La contrebande vient du Somaliland parce que dans cet Etat auto-proclamé, la pression fiscale est faible et les marchandises d'autant moins chères. Comme aux Emirats Arabes Unis où nombre de nos commerçants vont s'approvisionner.

Elle vient également d'Ethiopie, avec ou sans la complicité des routiers éthiopiens en provenance des Hauts Plateaux. Des produits tels que le carburant, l'alcool populaire éthiopien, le café ou le têf (servant à préparer la célèbre galette éthiopienne " anjero " franchissent clandestinement la frontière éthio-djiboutienne et s'écoulent à bon prix sur le marché national, quand ils ne repartent pas pour d'autres destinations.

La contrebande offre ce que n'offre plus l'économie officielle à un pouvoir d'achat social fortement réduit : un bon rapport qualité-prix.

Voilà pourquoi il devient tentant, pour des particuliers mûs par l'appât du gain, de se lancer dans le commerce illicite. Et que cela marche...

Mais il n'y pas que les contrebandiers individuels qui opèrent, mais aussi et surtout les gros importateurs qui trouvent dans la contrebande une nouvelle source d'approvisionnement. Selon nos informations, moyennant bakchich à qui convient, des tonnes de marchandises de toutes natures franchissent de nuit la frontière pour garnir les rayons et autres stocks de la place. Il faut dire que lorsque ceux-là mêmes (civils ou en uniforme) censés combattre la contrebande, ne sont pas payés depuis sept mois, l'argument sonnant et trébuchant peut permettre des prouesses pour les inconditionnels du profit substantiel.

Comment alors soigner ce symptôme ? En soignant la maladie, c'est-à-dire en l'attaquant aux racines. Et l'attaquer aux racines, c'est mettre fin à la crise économique et à l'inflation fiscale. Or, une crise économique telle que la nôtre puise ses causes dans le système de gouvernement créé et entretenu par le régime en place. Elle est liée à la logique de prédation, de pouvoir personnel et de dépenses injustifiées. Elle est liée à l'environnement d'incertitude politique, de non-droit et de guerre civile.

Le redressement économique ne peut donc s'opérer sans paix civile et sans concorde nationale, sans démocratie et sans droits de l'Homme, ni sans bonne gouvernance. Toutes conditions élémentaires nécessaires au renouveau démocratique et à la reconquête de la crédibilité internationale.

Loin d'être un phénomène superficiel, la contrebande galopante dont nous gratifient nos frontières est un symptôme sérieux du mal profond qui secoue notre pays. Et pas seulement un symptôme de plus...


MONDE


SOMMET AFRIQUE-EUROPE: LA DEMOCRATIE ET LES DROITS DE L'HOMME AU CŒUR DES TRAVAUX


Au cœur des travaux du premier sommet Afrique-Europe qui s'est tenu au Caire en Egypte lundi 27 et mardi 28 mars 2000 derniers, la démocratie et les droits de l'Homme ont été au centre des discussions. Encore une fois, les débats ont fait ressortir le caractère vital de l'enracinement démocratique et du respect des droits de l'Homme ainsi que de la bonne gouvernance pour les peuples. Il ne peut en effet y avoir véritable développement sans liberté, c'est-à-dire sans protection des droits sacrés de la personne humaine. Le développement étant, faut-il le rappeler, pour et par la personne humaine.


Dans un pays démocratique, où la liberté est garantie sous toutes ses formes (pensée, conscience, opinion, expression, réunion, association, etc.), l'exercice du pouvoir d'Etat ne peut se faire comme le veut celui ou celle qui le détient à un moment donné. Il est soumis à la vigilance nationale et au contrôle démocratique. Qu'il s'éloigne du droit chemin, du programme pour lequel il a été élu, et la sanction populaire tombera. L'opposition démocratique, la presse libre, la société civile... sont autant de forces, ne l'oublions pas, qui participent à l'exercice démocratique. D'où découle l'exercice citoyen de la politique.

La bonne gouvernance elle-même, qui commande que l'on mette l'homme qu'il faut à la place qu'il faut et que l'on respecte les règles et critères républicains, cette bonne gouvernance n'est réellement possible que grâce au contrôlé démocratique. L'homme est ainsi fait qu'il a besoin d'être encadré et contrôlé pour agir positivement. C'est pourquoi la démocratie a été inventée par l'homme et que la séparation des pouvoirs y a été organisée. Le pouvoir doit arrêter le pouvoir, écrivait Montesquieu, grand philosophe français du XVIII ème siècle.

Voilà pourquoi, au grand dam des derniers autocrates encore au pouvoir en Afrique, d'ailleurs tous en difficultés, la démocratie et les droits de l'Homme et leur corollaire la bonne gouvernance ont encore ravi la vedette aux autres sujets.

Bien sûr, la question de la dette a également été évoquée et son allégement promis, mais non sans que le lien étroit entre le niveau de l'endettement et le déficit de démocratie et de bonne gouvernance ait été clairement établi. En effet, et ce n'est un secret pour personne, le fardeau de la dette tant mis en avant par les autocrates africains, est la conséquence de la mal-gouvernance et du déficit démocratique. S'il y avait eu un véritable contrôle démocratique, l'avenir des peuples d'Afrique (et d'ailleurs dans le reste du monde en développement) n'aurait pas été hypothéqué par un endettement douteux qui a trop souvent servi à entretenir le train de vie scandaleux des régimes autocratiques et à enrichir leurs dignitaires. Que d'" éléphants blancs " coûteux gisent à travers la terre d'Afrique ! Que des milliards se sont volatilisés aux dépens des peuples en survie difficile !

L'on comprend, dès lors, que devant l'échec cinglant de la pensée unique et du parti unique, le monde développé, qui sait de quoi il parle pour avoir su tirer le plus grand profit de la démocratie et des droits de l'Homme, nous rappelle à l'évidence.

Alors vive la démocratie, protectrice des droits de l'Homme et garante de la bonne gouvernance et du développement.

HYDRAULIQUE

L'eau potable inégalement repartie

L'eau est une ressource renouvelable (via le cycle de l'eau, soit 1 385 985 km³) mais ses réserves ne sont pas pour autant illimitées. Les experts prédisent que toutes les eaux de surface seront consommées d'ici 2100 et que toute l'eau disponible dans le cycle de l'eau de la terre sera entièrement épuisée d'ici 2230"

L'eau est un problème posé à l'échelle du globe et dont la résolution commande le devenir des sociétés : sans elle, pas de vie ni développement.

Sans céder au catastrophisme, il faut pourtant constater que les ressources se raréfient en maintes régions, que le niveaux des réserves baisse, que la population est largement répandue et que la désertification avance.

Si la population du globe a été multipliée par trois au cours de ce siècle, la demande en eau, elle, a été multipliée par sept et la surface des terres irriguée par six.

Au cours des cinquante dernières années, la pollution des nappes aquifères a réduit les réserves.

L'eau est une source finie, inégalement répartie dans le temps et l'espace. Un habitant des Etats-Unis utilise 700 litres d'eau par jour, un Africain doit se contenter de 30 litres, contre 200 litres par jour pour un Européen et 20 litres pour un Haïtien.


En moyenne, un Israélien consomme quatre fois plus qu'un Palestinien, conformément aux accords de Taba (dit Oslo II) signé à Washington le 28 septembre 1995 entre l'Autorité Palestinienne et l'Etat hébreu. Cet accord officialise le partage léonin des aquifères de Cisjordanie : 82% aux Israéliens et 18% seulement aux Palestiniens, soit 260 litres pour un Israélien et 70 litres pour un Palestinien. Lors des négociations, Israël refusa d'attribuer plus d'eau aux Palestiniens, arguant qu'ils pouvaient être alimentés par le Nil.


Cette suggestion a été considérée comme une provocation belliqueuse par les Egyptiens.

Le gouvernement de l'Afrique du Sud s'est fixé comme première priorité la fourniture d'au moins 25 litres d'eau par jour (pour les besoins de l'hygiène) à chacun de ces citoyens en abordant la question sous l'angle de la dignité et de l'équité.

L'agriculture absorbe les deux tiers de la consommation mondiale d'eau, mais elle doit compter avec l'intense concurrence des activités des villes, plus particulièrement dans les pays émergents.

Les problèmes de l'eau ne sauraient être traités isolément : ils doivent être intégrés dans les schémas de développement économiques et sociaux, afin d'assurer les besoins humains fondamentaux et de préserver les écosystèmes.

Ce qui est en jeu, c'est la sécurité alimentaire, la santé des populations, la paix et la stabilité du monde. L'ONU recense environ 300 zones potentielles de conflits.

Pour ne prendre que des exemples des sphères régionales, tels que le conflit Israëlo-Arabe, vieux d'une cinquantaine d'années, la question s'éclaire d'elle-même.

L'argument de début du mouvement sioniste était de reconquérir la terre promise (Galilée, Judée et Samarie). A partir de 1967, est apparu l'argument de la sécurité (contrôler le terrain pour empêcher les attaques.). Et à l'aube du 3éme millénaire, vient l'argument de l'eau. Shimon Perès le résumais ainsi : " Nous avons deux mers : l'une est morte ( Mer Morte), et si nous abandonnons l'autre ( Mer de Galilée), c'est du suicide ". Dans une de ses dernières déclarations, Yitzahak Rabin avait affirmé, à propos du Golan, qu'Israël avait besoin de garanties les plus solides " car pour le peuple israëlien, l'eau est beaucoup plus importante que la paix".

L'autre guerre majeure de l'eau dans la région, mais cette fois en Afrique, est celui du Sud-Soudan qui oppose les rebelles sudistes au pouvoir de Khartoum. La toile de fond de cette guerre est le conflit entre l'Ethiopie et l'Egypte à propos du partage des eaux du Nil. L'Ethiopie apporte son soutien aux rebelles du Sud-Soudan et singulièrement dans l'attaque du chantier du Canal de Jonglai, un projet egypto-soudanais, qui consiste en la constitution d'un canal sur le Nil près de la frontière soudano-éthiopienne.

L'interaction entre conflits de l'eau et conflits géostratégiques accroît le risque d'affrontement armé dans la mesure où les intérêts vitaux des pays sont en jeu. Mais à terme, elle peut aussi contribuer à démilitariser les conflits par le biais de solutions techniques. Des solutions techniques qui du reste s'avèrent limitées dans un avenir proche :

- faible quantité d'eau récupérée par le traitement des eaux usagées. Un litre d'eau d'une rivière française est recyclé jusqu'à six fois. Dans les pays du Sud, il sert une fois ;

- coût prohibitif du dessalement de l'eau de mer.

Cette dernière entreprise suppose évidemment qu'on invente un système économiquement compétitif de dessalement de l'eau.

Pour le moment, il n'y a que l'Arabie Saoudite et le Koweït qui sont partis le plus loin dans l'expérimentation du dessalement vu que l'énergie est très bon marché. Certes, séparer le sel de l'eau ne pose pas de problème. Ce qui est difficile, c'est, après les avoir séparés, de retenir l'eau et non le sel. Il semble ridicule que nous soyons encore incapables de séparer à bas prix le sel de l'eau de la mer. Mais, nous diriez-vous, pour diminuer le coût actuel de telles opérations, pourquoi ne pas essayer la solution écologique : il s'agirait d'utiliser l'énergie solaire puisque la région Mer Rouge se prête idéalement au captage de l'énergie solaire. L'utilisation de l'énergie solaire reste pour l'heure limitée et dépend de découvertes scientifiques encore aléatoires.

Force est de constater qu'aussi bien la Turquie et le Golan syrien pour le Proche Orient que l'Ethiopie pour les pays du Nord-Est Africain, représentent de véritables châteaux d'eau .Alors pourquoi se concentrer sur le dessalement de l'eau de mer plutôt que sur la redistribution des eaux disponibles à l'échelle des pays de la région ?

Ce qui est particulièrement inquiétant, c'est que dans cette région, l'interaction entre questions hydropolitiques et les facteurs géopolitiques (impératif politique de l'autosuffisance agricole, absence de marché commun et d'approche commune du développement) empêche la recherche de nouvelles sources d'eau potable.

L'adoption d'une coopération régionale pour exploiter les ressources existantes, nous évitera le pire des scénarios, qui peut se produire si l'on considère l'équation croissance démographique-tarissement des sources. La population de la région aura doublé d'ici vingt ans, les sources aquifères ne sont pas renouvelables, le niveau pluviométrique diminue et l'évaporation s'intensifie, alors que l'agriculture, qui consomme entre 75 et 90% de l'eau disponible, est soit trop archaïque et dispendieuse, soit trop ambitieuse, soit d'une préservation défectueuse (pollution, mauvais entretien des infrastructures, etc.).

Les solutions sont donc autant politiques que développementales. La communauté internationale ayant un grand rôle à jouer dans la sauvegarde et la préservation des ressources hydrauliques.

Dès lors, il semble que l'implication des acteurs internationaux : O.N.U., Union Européenne, Etats-Unis, Banque mondiale, devient nécessaire à l'instauration de dynamiques régionales de paix et de coopération. Sans pour autant renoncer à rêver d'un organisme qui régulerait la gestion mondiale de l'Eau.

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