LE RENOUVEAU 356
du Jeudi 20 Avril 2000
Organe d'information du PRD

Diffusion par l'ARDHD
Directeur de publication : Daher Ahmed Farah
Rédaction - Administration :
Edité par la Commission Communication du Parti
Avenue NASSER tel :35 14 74 B.P : 3570
Tirage : 1500 exemplaires . Dépôt Légal N°365

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LE RENOUVEAU

N° 356 du Jeudi 20 Avril 2000

politique exterieure


djibouti-SOMALILAND :Le pouvoir djiboutien Tel qu'en lui-même


Comme nous en avons rendu compte dans notre dernière édition, une affaire curieuse a éclaté entre le Somaliland voisin et le régime djiboutien au sujet du " plan de paix de Monsieur Ismaël Omar Guelleh pour la Somalie ". L'Etat auto-proclamé du Somaliland, peuple et autorités confondus, s'est invariablement montré hostile à l'initiative du régime djiboutien. En dehors de quelques rares voix isolées, qui semblent liées au pouvoir djiboutien (du moins selon les dirigeants somalilandais), l'ancienne colonie britannique en Somalie ne s'est pas reconnue dans le plan de Monsieur Ismael Omar Guelleh. Il faut croire que les Somalilandais restent très majoritairement attachés à ce qu'ils considèrent comme la liberté retrouvée : en 1960, ils se sont massivement, pour ne pas dire unanimement, enthousiasmés pour l'unification avec le nord-est et le sud somaliens colonisés eux par l'Italie, fondant la République de Somalie où la dictature du général Mohamed Siad Barreh les a gravement saignés.

Le pouvoir djiboutien, qui n'a pas brillé par sa cohérence dans la question somalienne, les a d'ailleurs confortés dans leur position indépendantiste en adoptant une politique ambiguë à leur égard. Que ce soit au niveau protocolaire ou dans le contenu des rapports politiques, Djibouti a suivi une attitude hypocrite qui relevait de la séduction-encouragement, tranchant avec le discours officiel réunificateur tenu à l'occasion sur la scène internationale. Comme le rappelait à la télévision gouvernementale vendredi le vice-président de l'Assemblée Nationale, Monsieur Idriss Harbi Farah, les officiels somalilandais (ministres et autres hauts administrateurs) étaient reçus comme tels par leurs homologues djiboutiens avec lesquels ils évoquaient d'égal à égal les relations entre les deux pays et les questions d'intérêt commun. Un Bureau de représentation était même ouvert au nom du Somaliland et le représentant dûment mandaté par les autorités de Hargueissa était traité avec des égards dignes d'un responsable diplomatique d'un pays reconnu. Par exemple, le véhicule de service du représentant somalilandais, qui n'était certes pas immatriculé CD (Corps Diplomatique), n'en bénéficiait pas moins du régime d'exonération fiscale grâce à une immatriculation TT.

Ainsi, même si le jeu de séduction-encouragement du pouvoir djiboutien a connu parfois quelques ratés comme la mémorable colère du Monsieur Mohamed Hadji Ibrahim Egal, président de l'Etat auto-proclamé, refusé au sommet de l'IGAD de 1998 à Djibouti-ville où il était spécialement venu y assister en qualité d'observateur (fort, semble-t-il, des assurances de certains milieux politiques djiboutiens influents), les relations entre les deux parties s'entretenaient sous de bonnes auspices. De sorte que les Somalilandais y ont vu un soutien dans leur recherche éperdue de reconnaissance internationale. Ils y ont tellement cru qu'ils ont pris fait et cause pour Monsieur Ismaël Omar Guelleh dans la succession à la tête de l'Etat djiboutien. Le Rassemblement Populaire pour le Progrès (RPP), parti au pouvoir en République de Djibouti depuis l'Indépendance de 1977, a ainsi pu ouvrir avec une facilité déconcertante des antennes dans les villes somalilandaises (Hargueissa, Borama, Gabiley, Barbara, etc.), sous la houlette d'un certain Said Abdillahi Ahmed dit Nalatour, ressortissant djiboutien patron de Hôtel de Djibouti dans la capitale djiboutienne. Inutile de dire que la campagne en faveur du neveu du président sortant, Monsieur Ismaël Omar Guelleh, faisait rage dans l'Etat auto-proclamé la veille du scrutin du 9 avril 2000 qui allait tourner au hold up électoral au profit de Monsieur Ismael Omar. C'est par un véritable pont aérien entre Hargueissa et Djibouti-ville que les Somalilandais sont d'ailleurs venus à la rescousse du " candidat officiel ".Tout l'Etat auto-proclamé s'est mobilisé en faveur de Monsieur Ismaël Omar , et le représentant spécial de ce dernier n'a pas hésité à remercier officiellement, par voie de presse (communiqué publié dans le journal somalilandais Al Jamhurya), les principaux dirigeants locaux qui n'avaient ménagé ni leur temps ni leur énergie pour " faire passer " le neveu de Monsieur Hassan Gouled Aptidon : les ministres de l'Intérieur, de la Justice, des Transports, les directeurs de l'Aéroport de Hargueissa et de la Compagnie aérienne Air Djibouti, la Présidence, etc.

Il va de soi qu'une telle mobilisation locale en faveur du " candidat officiel " et une telle sollicitude à l'endroit du pouvoir djiboutien n'étaient pas sans mobile et visaient à obtenir quelque geste en retour. En réalité, tout cela n'aurait pu s'envisager sans assurances de la part de Djibouti.. " Un service de ce type et de ce niveau, nous confiait à l'époque un observateur averti des relations entre les deux pays, suppose récompense ".

La suite, nous la connaissons. Aussitôt le pouvoir usurpé, Monsieur Israël Omar, loin de se soucier de ses alliés de circonstance, opère un revirement de 180 degrés. Il tire de son keffieh, comme d'autres de leur chapeau, ce qu'il appelle son " plan de paix pour la Somalie ". Fini les yeux doux au Somaliland. Oublié le jeu de la séduction à l'Etat auto-proclamé. Le Somaliland n'est plus, pour celui qui se découvre une vocation de pacificateur réunificateur de la Somalie, qu'une portion somalienne certes en paix mais comme une autre. Donc à intégrer dans le puzzle de sa reconstitution, qu'il croit avoir savamment imaginée.

Incrédules, les Somalilandais s'informent et s'entendent confirmer les nouvelles intentions de Monsieur Guelleh :la réunification somalienne.

Les considérations de politique intérieure qui sous-tendaient hier les ambiguïtés du régime djiboutien (et particulièrement d'un certain chef de cabinet du nom de Ismaël Omar Guelleh), semblent encore motiver aujourd'hui l'initiative de l'occupant de l'ancien Béit-El-Wali, nom local du palais du gouverneur du temps colonial. Il s'agissait hier de réussir son hold up électoral et, de par ses pseudo-bonnes relations avec le Somaliland, de sécuriser les frontières sud : l'opposition armée avait démontré qu'elle pouvait frapper au sud comme au nord et qu'Ali-Addé (au sud) n'était pas plus à l'abri de ses attaques que Médého au nord Il s'agit aujourd'hui pour Ismaël Omar de tenter une grande opération de politique extérieure dans l'espoir puéril de trouver à l'extérieur des frontières une légitimité qu'il n'a pu obtenir à l'intérieur.

Les Somalilandais n'ont plus alors qu'à se rendre à l'évidence : Ismaël Omar Guelleh et son régime les ont floués. Le ressentiment s'installe, alimentant la réaction dont l'on devine la virulence.

Mais Ismaël Omar Guelleh n'en a cure. Il fonce comme si de rien n'était. Fidèle à lui-même, il continue à ignorer, officiellement du moins, l'hostilité du Somaliland à son " plan de paix ".

Voilà dans quel contexte surviennent les derniers rebondissements auxquels nous assistons depuis samedi 8 avril 2000.

A cette date, le pouvoir djiboutien invente de toutes pièces (il est plutôt coutumier du fait) une invitation du Sénat somalilandais et dépêche à Hargueissa une délégation conduite par un certain Idriss Harbi Farah, vice-président de l'Assemblée Nationale, tiré de son hibernation pour la circonstance. La réaction somalilandaise est immédiate qui bloque la délégation de Monsieur Ismaël Omar à l'aéroport de Djibouti. Déballage sur les ondes de la BBC par les autorités somalilandaises qui oblige le régime Guelleh à avouer n'avoir jamais reçu d'invitation. Non sans ajouter qu'il n'abandonnera pas son projet de délégation au Somaliland.

Aussitôt dit, aussitôt fait : la délégation de Monsieur Ismaël Omar retourne à la charge, parvenant cette fois jusqu'à la l'aéroport de Hargueissa. Il semble que l'avion de Daalo Airlines ait pratiquement été réquisitionné, ce qui donne une idée de l'acharnement djiboutien. Qui n'en échoue pas moins : la délégation (plutôt forte puisqu'elle compte plusieurs dignitaires, petits et grands) est invitée à ne pas fouler le sol somalilandais ; elle reste donc à bord de l'avion la transportant avant de devoir rebrousser chemin, visiblement sous le choc. A croire qu'elle s'imaginait pouvoir passer en force !

Le sieur Idriss Farah, de retour à Djibouti, doit dare-dare donner le change au Somaliland qui, dans l'intervalle, a tout révélé sur la BBC. Le régime djiboutien n'a pas fière allure. Ismaël Omar Guelleh, formé à l'école de la facilité, doit enrager dans sa résidence cossue de Haramous. Du moins, la nouvelle sortie du pouvoir djiboutien n'indique-t-elle pas le contraire : le représentant du Somaliland à Djibouti, hier encore " amicalement traité ", est déclaré persona non gratta et expulsé aussitôt. Sans bagages, il est conduit à la frontière terrestre de Loyada aussitôt que lui est notifiée la décision d'expulsion. Il n'a donc même pas le temps de faire ses valises. Ni en son bureau ni à son domicile. Et il ne se gêne pas pour le dire sur la BBC Service Somali qui ces jours-ci trouve là un feuilleton d'un genre nouveau à diffuser. Et pour boucler la boucle, l'on apprend que les frontières (Terre, Air, Mer) sont menacées d'être fermées avec le Somaliland, et que les moyens de communication en phonie restent suspendus. La rumeur parle même de mesures économiques contre des commerçants djiboutiens opérant au Somaliliand. Bref c'est la totale...

Belle tournure pour le " plan de paix " du régime. D'autant plus belle que le Puntland, Etat régional du Nord-Est somalien, bruit de mêmes sons hostiles. Et cela à quelques jours seulement du début de la conférence de réconciliation dont les préparatifs se poursuivent péniblement à Arta à quarante kilomètres de la capitale. Petite localité sans infrastructure d'accueil où tout doit être mis en place. Les participants à la réunion doivent d'ailleurs palabrer sous une tente...

Tournure lamentable confirmée par le report sine die (hier mercredi 19 avril) de la conférence de réconciliation prévue pour le 20 avril. Officiellement : à la demande du peuple somalien. En réalité, pour des raisons profondes liées au déficit de crédibilité de l'initiative et du régime djiboutien, à la représentativité insuffisante des participants, à l'impréparation, à la gestion autoritaire du " plan de paix " par le pouvoir djiboutien, etc.

Ne voila-t-il pas qui confirme nos doutes contenus dans un articule publié en mars 2000 ? Relisez-le plutôt.


SOMALIE : A CRISE COMPLEXE,CREDIBILITE ET CLAIRVOYANCE

La Somalie traverse depuis bientôt dix ans une tragédie sans précédent dans son histoire contemporaine. Avec la chute du régime sanguinaire du dictateur Mohamed Siad Barreh, l'Etat somalien s'est effondré. Le spectacle de la mort et de la destruction s'est installé, plongeant les Somaliens dans une guerre civile d'un autre âge. Les effets cumulés de vingt ans de siadisme fossoyeur se sont effroyablement manifestés au détriment de la paix civile, de la concorde nationale et de l'Etat. Le monde assistait, incrédule, à l'implosion de l'un des pays phares de l'Afrique post-coloniale, l'un des tout premiers où l'alternance démocratique avait pu fonctionner à plein, avec le départ du président Aden Abdullah Hassan des affaires à la suite des élections de 1967 qu'il perdait. Ce pays fascinant et fort de son homogénéité ethnique, culturelle et historique, s'écroulait avec une incroyable brutalité.

C'est un gigantesque feu, dont les tisons étaient d'autant plus ardents qu'ils étaient allumés de longue date, qui se déclarait. La bombe laissée par un régime dictatorial, corrompu, diviseur au possible, qui avait exploité, pour perdurer, la moindre contradiction d'une société qu'il connaissait mieux que quiconque pour en être issu, cette bombe infernale explosait donc dès la chute du vieux pyromane galonné.

Le Nord-Ouest faisait sécession et s'auto-proclamait Etat indépendant, sous la direction du Mouvement National Somalien (MNS), tandis que le reste s'embrasait sans que les mouvements d'opposition armée tels que le United Somali Congress (USC) du Général Mohamed Farah Aïdid, père de Houssein Mohamed Aïdid, le Somali Patriotic Mouvement (SPM) du Colonel Omar Ges ou le Somali Salvation démocratique Front (SSDF) du général Abdillahi Youssouf ne pussent contrôler la situation.

La première tentative de réconciliation viendra de la petite République de Djibouti, pays frère dont la Somalie avait beaucoup œuvré pour l'Indépendance. Mais en vain. Le Général Mohamed Aïdid aura boudé Djibouti où son rival civil Ali Mahdi Mohamed, issu de ce que l'on appelait alors le Groupe Manifesto, jouait les vedettes ; le MNS aura manqué à l'appel qui contrôlait déjà le Somaliland (appellation coloniale du Nord-Ouest somalien durant son occupation par la Grande Bretagne). Les résultats de la conférence dite de réconciliation somalienne de juillet 1991 à Djibouti (mise en place d'un président, d'un gouvernement ainsi que d'une assemblée de transition) étaient voués à l'échec.

Il en ira de même pour toutes les autres tentatives de réconciliation d'où qu'elles viennent : du Kenya, d'Ethiopie, du Yémen, d'Egypte, etc.

C'est dans ce contexte d'impasse que Monsieur Ismaël Omar Guelleh, dont le pouvoir est issu du hold up électoral du 9 avril 1999, lance ce qu'il a appelé son plan de paix pour la Somalie. Il annonce son initiative de la tribune des Nations Unies à New York par un jeudi 23 septembre 1999 au moment même où ses forces de l'ordre arrêtent à son domicile djiboutois et à coups de balles réelles (qui font un mort et plusieurs blessés) le président de l'Opposition Djiboutienne Unifiée (ODU), son unique adversaire (victorieux mais spolié) à l'élection présidentielle du 9 avril 1999, Monsieur Moussa Ahmed Idriss, incroyablement accusé d'un délit de presse. Délit qui n'existe que dans l'imagination du régime et pour lequel le général Ali Mehidal Waïss , co-directeur de publication du mensuel Le Temps (en raison de l'immunité parlementaire du directeur de publication Moussa Ahmed Idriss), est, de toute façon, déjà emprisonné à la sinistre prison de Gabode, aux côtés du président du Parti du Renouveau Démocratique (PRD) et directeur de publication de l'hebdomadaire le Renouveau Daher Ahmed Farah (DAF) accusé lui aussi " d'atteinte au moral des forces armées et de diffusion de fausses nouvelles ".

Promu à grand renfort d'opérations publicitaires, où prédomine le culte de la personnalité de son initiateur, gérée de manière à masquer une situation intérieure djiboutienne explosive, à laquelle l'ancien chef de cabinet ne répond que par le tout répressif, le " plan de paix " de Monsieur Guelleh obéit en réalité à des considérations politicardes de politique intérieure : perdurer au pouvoir grâce à l'extérieur. Il ne fait pas l'unanimité parmi les Somaliens. Il rencontre même au fil des semaines et des mois de fortes oppositions. De sorte que les interrogations ne tardent pas à se faire entendre sur son issue. Le choix des participants à la conférence, l'établissement du calendrier, la conduite des concertations et autres consultations, les implications sous-régionales, et jusqu'à la crédibilité de l'initiateur et principal acteur du plan de paix, nombreux sont les points où cristallise la critique. Qu'elle soit publique, ou faite en privé.

L'Etat auto-proclamé du Somaliland a déjà fait connaître son rejet de l'initiative du fils de Omar Guelleh et l'on a pu observer ici ou là des manifestations populaires hostiles au " plan de paix ", Messieurs Abdillahi Youssouf et Houssein Aïdid, respectivement président de l'Etat régional auto-baptisé Puntland et chef de la principale faction armée du Sud de la Somalie, martèlent leur hostilité et annoncent même la tenue d'une conférence parallèle de réconciliation à Tripoli en Libye, sans être aussitôt démentis par la Jamahirya. Tripoli dont Monsieur Ismaël Omar Guelleh ne cesse pourtant de s'enorgueillir du soutien dans ses " efforts de réconciliation somalienne ". D'autres voix hostiles s'élèvent un peu partout, comme par exemple dans les régions du Sud où l'on signale même des affrontements entre " opposants au plan de paix et partisans. " De sorte qu'une personnalité de ce Sud s'indigne voilà peu sur les ondes de la BBC : " Monsieur Ismaël Omar Guelleh, avec son plan de paix, ne contribue pas à la paix sur le terrain ".

Il va de soi que le dossier somalien n'est pas une mince affaire. C'est une situation complexe où s'enchevêtrent les contradictions, interagissent les intérêts (parfois extérieurs au peuple somalien lui-même ) et sont à l'oeuvre les passions. Et s'il est vrai qu'après plus de neuf ans de guerre civile dramatique, de morts, de destructions, de famines, de maladies, bref de régressions en tout genre, les Somaliens, dans leur immense majorité, aspirent à la paix et à revivre normalement, cela n'autorise aucun aventurisme prétendument pacificateur, aucuns calculs politicards, aucune solution extérieure avec ou sans visage somali ou somalien. Cela exclut la précipitation, le placage de réponses toutes faites sur des réalités concrètes promptes à réagir à tout ce qui lui semble douteux. La situation somalienne requiert beaucoup de sagesse pastorale, de luicidité, d'humilité, de crédibilité. Pour espérer agir positivement, il faut inspirer confiance : " Ninkaad kabo ka tolani kabihiissa ayaa la eega " - avant de se faire chausser chez quelqu'un, il faut regarder l'état de ses chaussures - dit le dicton somali. " Ninka tiisa daryeela ayaa takalana ku dara - avant de vouloir arranger les affaires d'autrui, il faut régler ses propres problèmes ", précise un autre dicton.

Mais si inspirer confiance est une condition nécessaire, tant le pasteur nomade est méfiant et jaloux de sa liberté, elle n'est pas suffisante. Il faut aussi savoir observer le terrain, parler aux hommes et aux femmes, les écouter, bien cerner les racines du mal avant d'esquisser le moindre début de solution.

Parallèlement, et afin de renforcer la dynamique d'apaisement général, il faut pouvoir rappeler à ces pasteurs nomades, perturbés par l'intrusion de la ville coloniale, la douceur inégalable du lait de la paix (comme le dit si bien le diction somali), en obtenant de la communauté internationale que soient aidées économiquement et socialement les régions ayant su rétablir la paix localement.

Le pasteur nomade aime bien voir les bienfaits d'une chose avant de l'adopter : ne dit-il pas " Dhamaan gartaa "- littéralement : " je saurai après l'avoir bu "- en réponse à la question de savoir ce qu'il pense du lait qu'on lui offre ? D'où la nécessité de prêcher par le concret et le pertinent.

Enfin, et c'est capital, il faut toujours garder à l'esprit qu'il n'y aura solution qui vaille que celle des Somaliens eux-mêmes. C'est à eux qu'il appartient de savoir ce qui est bon pour eux et ce qui ne l'est pas. On peut les aider à s'aider, les soutenir dans la direction où ils s'engagent pour se réconcilier. Jamais se substituer à eux , chercher à leur imposer quoi que soit, à les soumettre à ses intérêts. Ils savent repousser l'ennemi avec cette même fureur -décuplée par la technologie moderne, il est vrai- avec laquelle ils s'entre-déchirent.

Il faut donc y aller humblement ; avec la démarche éprouvée du sage somali connu et reconnu. A petits pas, en donnant bien pastoralement du temps au temps.

A bon entendeur...

Education

Les élèves de 3ème en grève

Depuis lundi dernier, les élèves de 3ème des collèges manifestent leur mécontentement, descendant même dans la rue. Parti du collège d'enseignement secondaire le plus récent, que le ministère de l'Education a installé dans certains des locaux du camp militaire Omar Aline de Boulaos, dont l'autre partie abrite le Bataillon Artillerie de l'Armée Nationale, le mouvement de grève tend à se généraliser. Nombreux sont les collégiens qui bravent la chape de plomb du pouvoir en place et crient leur colère dans les grandes artères de la capitale : Boulevard de Gaulle, Boulevard de la République...

Bien sûr, les forces de l'ordre chargent les manifestants, usant comme d'ordinaire de gaz lacrymogène et de coups de matraque, mais cela n'affecte en rien la détermination des collégiens. Ils savent ce qu'ils font et persévèrent.

Motif : protester contre une mesure ministérielle de fraîche date qui durcit les critères d'admission de la 3ème à la classe de Seconde déjà réputée être un terrible goulot d'étranglement. En effet, loin de démocratiser ce passage du premier cycle secondaire au deuxième, le ministère subordonne désormais l'admission en Seconde à l'obtention du Brevet d'Etudes du Premier Cycle (BEPC) : suivant cette mesure, les notes du BEPC compteront pour 60%, contre seulement 40% pour le contrôle continu, dans l'évaluation de la moyenne finale sur laquelle reposera la sélection pour l'admission en Seconde.

Les élèves jugent injuste que les résultats du BEPC, c'est-à-dire ponctuels et pas toujours probants, soient prépondérants par rapport au travail de toute l'année scolaire de l'élève. " D'autant que, ajoutent-ils, la crédibilité des examens nationaux tels que le BEPC ou l'entrée en 6ème, a été entachée de fuites d'épreuves ces dernières années au profit des enfants des dignitaires du pouvoir ".

Il y a là, on le voit, un sérieux problème dont les élèves ne se trompent pas sur la portée.

A suivre.


Les suppléants subissent des retenues de solde


Les instituteurs suppléants en service dans les écoles primaires publiques se sont vu opérer des retenues sur leur solde au titre des jours de grève observés depuis le début de l'année scolaire. Des retenues parfois si importantes qu'il n'est pratiquement rien resté d'une solde déjà réduite à la portion trop congrue par les coupes salariales successives décidées au fil des ans par le régime prédateur en place.


Ces retenues ne concernent pour l'heure que les suppléants, la catégorie statutairement la plus fragile du corps enseignant qui ne bénéficie pas de la sécurité de l'emploi que garantit (sur le papier) le fonctionnariat.

Pourquoi donc ces retenues sélectives ? Certainement, cette mesure vise à briser la cohésion du mouvement enseignant en s'attaquant d'abord aux plus vulnérables, pour ensuite jeter son poison sur l'ensemble de la profession.

Il appartient donc aux enseignants d'en tirer les conséquences en rappelant comme un seul homme que les jours de grève résultent de la non-observation par l'Etat de ses engagements en matière de solde : le travail régulier des agents de l'Etat suppose le règlement régulier de la solde à la fin du mois pour assurer à l'employé les moyens de sa subsistance. Et que de ce fait, si faute il y a (jours de grève), elle est imputable à l'Etat et non aux grévistes qui n'ont fait que réclamer leur dû à un régime peu enclin au dialogue civilisé. Ce qui fonde les victimes à exiger le remboursement des sommes retenues.

A suivre.

 

Administration

Les agents Obockois de l'Etat se plaignent


Les agents de l'Etat au district d'Obock se plaignent de retards par trop prolongés dans le paiement de leur solde par l'administration du district. Une situation qui, selon eux, dure depuis 1993.


Dans une lettre adressée au Commissaire de la République Chef du district le 5 février 2000 dernier sur le sujet, les délégués des agents du district écrivent que leur district est toujours payé le dernier et que, de plus, la période de règlement de la solde n'excède pas quelques jours, ce qui ne permet pas aux salariés éloignés de venir percevoir leurs émoluments. Dans le même courrier, ils font également état de ce qu'ils appellent " la confusion totale " concernant les prestations familiales : certains agents les percevraient, d'autres non, et le montant varierait parfois d'un mois à l'autre.

Les agents de l'Etat au district d'Obock, région sinistrée par la guerre s'il en est, lancent maintenant par voie de presse un appel à qui de droit pour voir cette situation pénible cesser.

Ils profitent d'ailleurs de l'occasion, pour rappeler que copie a été adressée (de leur correspondance du 5 février 2000 au chef du district d'Obock) aux ministres des Finances, de l'Intérieur, de l'Emploi, de la Justice et de la Jeunesse-Sports-Loisirs.

A suivre.

 

Information

Les média gouvernementaux égaux à eux-mêmes

Décidément, il est des plus difficiles aux média gouvernementaux de revenir à la mission fondamentale qui est la leur, à savoir informer en toute objectivité et en toute sérénité. Depuis longtemps habitués à danser pour le prince dont ils ont appris à traduire jusqu'aux moindres désirs, au point que d'aucuns les traitent d'albums officiels, les médias publics, qui ne sont devenus gouvernementaux que dans les faits, peinent à se normaliser. Déconsidérés du fait de leur flagrante inféodation, ils ont du mal à reconquérir un minimum de crédibilité auprès du lectorat.

Difficile de se défaire de réflexes vieux de décennies entières. Difficile de faire de l'information quand on a toujours été la voix du maître. Difficile de songer à la liberté lorsque l'on a toujours vécu dans la servilité. Difficile de se relever pour qui a toujours été couché.

Ces jours-ci ne sont donc pas aisés pour le petit monde de la presse officielle. Il est livré aux affres de l'interrogation, du doute même, sans pouvoir y voir clair, se frayer une ligne. Tandis que le pays s'achemine inexorablement vers le changement, entraîné par l'air libérateur du temps et la volonté profonde d'un peuple qui a sacrifié jusqu'à son sang (ce qu'il a de plus précieux au monde), les média officiels jouent encore sur le mode désuet du plaire, s'abîmant dans une partition odieusement rétrograde.

C'est ainsi que la couverture du retour du président du FRUD, Ahmed Dini Ahmed, et de sa délégation, ceux-là mêmes qui ont signé " l'accord cadre de reforme et de concorde " du 7 février à Paris, a été escamotée. Que le seul journaliste, Ali Barkat Siradj de la Nation, qui a tenté de faire droit à la dignité professionnelle, a subi les foudres de la hiérarchie.

C'est ainsi également que le compte rendu de la visite de condoléances, au Palais présidentiel le 12 avril 2000, de l'opposition djiboutienne, civilisée et responsable, à Monsieur Ismaël Omar Guelleh dont le père venait de disparaître, laisse à désirer. La RTD a avalé des images et la Nation des noms. Comme ils ont toujours avalé leur dignité professionnelle. Outre les vues générales de la rencontre, la télévision a avalé les images de M Mahdi Ibrahim Ahmed God, président du FUOD, et de Kamil Mohamed Ahmed dit Kebir, membre dirigeant du FRUD, récemment sorti de Gabode. Quant au journal la Nation (édition du jeudi 13 avril 2000) et à la radio, ils ont ingurgité trop de noms et de choses.

Rappelons donc, pour rétablir la vérité pour les lecteurs et lectrices ainsi que pour les auditeurs et auditrices et autres téléspectateurs et téléspectatrices, que nous autres savons respecter, la composition de la délégation de l'opposition :

FRUD
-Ahmed Dini Ahmed, président
-Chehem Daoud Chehem, vice-président
-Dabale Ahmed Kassim, membre dirigeant
-Hassan Moukbel, membre dirigeant
-Kamil Mohamed Ahmed dit Kebir,membre dirigeant

Haut Conseil National de l'ODU

Au titre des partis et mouvements :
-Mahdi Ibrahim Ahmed God, président du FUOD
-Daher Ahmed Farah, président du PRD
-Aden Robleh Awaleh, président du PND
-Moumin Bahdon Farah et Ahmed Boulaleh Barreh, GDR

Au titre des personnalités :
-Ali Mehidal Waîss
-Farah Ali Waberi
-Ahmed Walieh Samatar


Société


Ce pédophile expatrié qui sévissait sous nos cieux.

Un pédophile de plus de cinquante ans qui sévissait dans la capitale où il travaillait et résidait, a été arrêté et écroué à la prison centrale de Gabode voilà plusieurs semaines, au courant du mois de mars 2000.

Répondant au nom de Jules Marciles, cet expatrié canadien était en poste à l'autorité Intergouvernementale pour le Développement (IGAD) à Djibouti, organisme auquel le liait un contrat de six mois renouvelé peu avant son arrestation. Spécialiste de la documentation, il avait été engagé pour la restructuration du centre de documentation de l'organisation.

Bien que marié et père de deux enfants, cet individu vivait en célibataire dans une belle villa de la cité de l'aviation où il se livrait à ses déviations sexuelles. Appâtant les jeunes garçons (certains avaient à peine quelques années) à coups de bakchich et autres petits cadeaux, il les prenait dans ses rets pour assouvir ses désirs de pervers sexuel. La police, alertée par des voisins, aurait d'ailleurs mis la main, au moment de son arrestation, sur des cassettes vidéo fort compromettantes dont certaines auraient été tournées au Kenya.

En effet, ce quinquagénaire avait été en poste au Kenya où il avait passé quatre ans avant de regagner le Canada d'où il était venu à Djibouti.

Il s'agissait donc d'agissements anciens et avérés, faisant peser de véritables dangers sur la société.

Selon nos informations, sous nos cieux, ses petites victimes sont nombreuses. Beaucoup vivant à Ambouli et dans les environs du lieu de résidence du pédophile.

Concernant son sort judiciaire, le coupable semble pour l'heure sous le coup d'un mandat de dépôt à la prison de Gabode et son procès suivrait son cours.

Espérons qu'il sera puni dans toutes les rigueurs de la loi et que ses innocentes victimes ne seront pas oubliées.

A suivre.

 

Droits de l'Homme

Soutien à l'opposant guinéen Alpha Condé

Le président du Parti du Renouveau Démocratique (PRD), Daher Ahmed Farah, le Bureau National du Parti ainsi que son journal le Renouveau, seul organe de presse libre à encore paraître en terre djiboutienne, expriment leur total soutien à l'opposant guinéen Alpha Condé, principal adversaire politique du président-général Lanzana Conté. Jeté en prison en décembre 1998, au lendemain d'une élection présidentielle très controversée où le chef l'Etat sortant, le général Lanzana Conté, avait visiblement recouru à la fraude, Monsieur Condé comparaît ces jours-ci devant la Cour de Sûreté de l'Etat, juridiction d'exception dont l'anachronisme en ce XXIème siècle naissant n'est que patent.

Universitaire de renom (il a notamment enseigné le droit international dans les universités parisiennes), et brillant intellectuel, Alpha Condé appartient à la génération de politiciens dont l'Afrique a tant besoin pour relever les défis du millénaire. Son emprisonnement arbitraire par l'autocratie galonnée qui mal-gouverne son pays s'inscrit dans les derniers soubresauts de l'alimentarisme politique dans un continent qui n'en a que trop souffert. Son combat est aussi le nôtre car c'est un combat contre l'obscurantisme fossoyeur et pour la démocratie libératrice.

Aussi demandons-nous la fin de la parodie de procès mise en scène à son encontre et sa libération immédiate.


Soutien au peuple tchetchène

Le Haut Conseil National de l'Opposition Djiboutienne (ODU) et son président Moussa Ahmed Idriss ainsi que le président du Parti du Renouveau Démocratique, Daher Ahmed Farah, et le Bureau National du PRD expriment leur solidarité avec le peuple tchetchène soumis à une violence féroce, et à des fins de politique politicarde intérieure, par le régime russe.

Ils exigent la fin de l'enfer que subit ce peuple martyr et lancent un appel à la communauté internationale pour intensifier les pressions sur le pouvoir russe afin de sauver les enfants, les femmes, les vieillards... tchetchènes du déluge de malheurs que leur impose Moscou.


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