LA LIBERTÉ Numéro spécial 8
12 mars 2001
Journal permanent et indépendant
de tous les djiboutiens de l'opposition

Bulletin
de l'A. R. D. H. D
2ème année

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LA LIBERTE
N° 39


 

11/03 Compte-rendu des trois journées d’audience
du procès intentés par trois Chefs d’Etat
contre François-Xavier Verschave auteur de NOIR SILENCE
et de son éditeur


(28 février, 6 et 7 mars 2001)



Les avocats de la défense sont : Antoine Comte, William Bourdon (ancien président de la FIDH) et Francis Nthepe (avocat camerounais, appartenant à la FIDH) pour F. X. Verschave et Vincent Toledano pour Laurent Beccaria.

Les avocats de la partie civile sont au nombre de trois : Jacques Vergès, Me Brossolet et Mme Dior Ndiagne, donc pour les trois chefs d’Etat.

Le Tribunal est présidé par le juge Jean-Yves Montfort



Mercredi 28 février à 13 h 30 : la plainte de Denis Sassou Nguesso était à l’ordre du jour.



1/ La séance a commencé par l’exposé des « incidents de procédure » (partie juridique et technique): les avocats de la défense ont exposé les possibilités d’annulation de la procédure, à savoir le problème de la prescription. Noir Silence a été publié officiellement le 13 avril 2000, mais il a été mis en circulation dès le 5 avril. Or les plaintes des Chefs d’Etat sont datés du 12 juillet. Si l’on prend la date du 5/04/00 comme date de départ, les trois mois légaux pour porter plainte sont dépassés.



A ce point, les avocats de la partie civile ont objecté que le livre a fait l’objet de plusieurs éditions (tirages, selon la rectification de Beccaria), et que par conséquent les trois mois sont renouvelés à chaque fois qu’une nouvelle édition sort.



2/ Après cette 1ère partie, l’audition des témoins a commencé.

F. X. Verschave a été interrogé par le Président du Tribunal sur chaque passage incriminé par Sassou.

Il a toutefois regroupé les passages incriminés en 2 grands « groupes »

- l’affaire du DC10 d’UTA.

- la qualification de « crimes contre l’humanité » concernant le régime de Sassou.



F. X. Verschave a répondu point par point en réaffirmant les faits reprochés ; en expliquant ses méthodes de travail.



Vergès l’a ensuite questionné et « attaqué » sur ses méthodes de travail.

Laurent Beccaria a également été entendu : on lui a demandé d’expliquer la ligne éditoriale des Arènes. Puis des questions techniques liées à son métier d’éditeur lui ont été posées.



Audition des témoins
Nous avons présenté les témoins suivants :


- Noël Mamère : (a témoigné contre Lissouba dans le procès en diffamation fait par ce dernier à H. Lindell de Témoignage Chrétien). Il est venu expliquer son rôle, en tant qu’homme politique, face à la tragédie du Congo-Brazza. Notamment il a exposé ses tentatives d’alerte de l’opinion publique et de la presse sur les massacres au Congo-Brazza : en particulier la conférence de presse qu’il a organisée début 1999 à l’Assemblée nationale. Il a salué la qualité du travail de FXV et son courage compte-tenu du silence qui a entouré cette terrible guerre civile.



- Henrik Lindell : (journaliste indépendant ; travaille pour Témoignage Chrétien, Réforme). Il a expliqué ce qu’il a vu au Congo-Brazzaville au plus fort des exactions (premier semestre 1999). Il a été un des rares journalistes occidental à enquêter sur place à cette période.



- Benjamin Toungamani : (professeur de biologie ; président de l’association France Congo Education ; secrétaire général du Comité Europe pour la paix et la démocratie au Congo). Il a centré son témoignage autour de la conférence nationale souveraine de 1991, à laquelle il a participé en tant que fondateur du parti PSDC le Pari.

Ce témoignage a été très important. Toungamani a très bien expliqué (avec un extrait de l’enregistrement de cette conférence) comment la Commission défense et crimes de la conférence a explicitement désigné Sassou comme ayant des responsabilités dans l’attentat du DC10 d’UTA.

Toungamani a par ailleurs expliqué que le régime de Sassou est tout sauf démocratique ; et qu’il est coupable de crimes contre l’humanité.



- Père Lucien Favre : (père spiritain suisse). Il a raconté ce qu’il a vu en vivant au sud-ouest du pays notamment en 1999 : càd, les crimes commis par l’armée et les milices de Sassou.



- Patrice Yengo : (universitaire congolais ; fondateur de la revue Rupture-Solidarité ; il a témoigné contre Lissouba dans le procès de Lindell). Il a donné son point de vue sur le régime de Sassou, et parlé aussi de la conférence nationale.



- Georges Kimbembe : (prêtre catholique du diocèse de Kinkala dans le Pool ; proche collaborateur de l’évêque Mgr Milandou, président de la conférence épiscopale). Il a expliqué ce qu’il a vécu : à savoir la matraquage en direct de la région du Pool dès la fin de la guerre civile de 1997 et jusqu’aux grands massacres de mi-décembre 1998. Puis, ce qu’il a vécu à Brazzaville en 1998/99.



Témoins de Sassou :

- Général Dabira : chef des milices Cobras (de Sassou) à partir du 05/06/97 ; il est le père d’un jeune homme monté dans le DC10 d’UTA, et dont FXV affirme dans NS qu’il est descendu à Ndjamena. Or le général Dabira affirme que son fils a bel et bien disparu dans l’attentat du DC10. Il a joué le rôle du père éploré, et n’a pas souhaité répondre à certaines questions de nos avocats. Il a en revanche reconnu avoir dirigé les milices Cobras et avoir eu comme supérieur hiérarchique direct le Général Sassou.

- Prosper Ngakeni (cousin de Sassou, professeur de philosophie à l’université de Brazzaville)

- Gabriel Oba-Apounou (cousin de Sassou, membre du Conseil National de Transition, équivalent de l’Assemblée nationale).



Les trois témoins de Sassou étaient là uniquement pour mettre en doute la version de FXV concernant l’attentat du DC10 d’UTA.



Conclusion :



Vergès a tenté de démonter les témoins présentés par les avocats de la défense en leur posant des questions de détail et non de fond. L’ensemble de la salle a manifesté sa réprobation face à l’agressivité et au manque de respect avec lesquels Vergès traitait nos témoins. Tous les témoins de Sassou sont membres de sa famille et du sérail. Le juge avait ainsi un exposé flagrant du népotisme qui règne au Congo-Brazzaville.



Mardi 6 mars à 13 h 30 : la plainte d’Idriss Déby était à l’ordre du jour.



Le principal enjeu de ce procès était de montrer qu’Idriss Déby est bien un « assassin invétéré », qu’il a commis plusieurs crimes contre l’humanité, notamment lors de septembre noir en 1984 et dans les deux Logones, de novembre 1997 à mars 1998.

Accessoirement, nous avons aussi démontré l’implication de son régime dans le faux-monnayage.



Témoins de la défense
Ngarléjy Yorongar


Ancien haut fonctionnaire international. Député fédéraliste. Maintes fois arrêté et torturé.

A évoqué :

– L’implication d’Idriss Déby dans une affaire de meurtre ( dès « le lycée »).

– “Septembre noir” et le rôle d’Idriss Déby dans ce massacre ainsi que son caractère ethnique.

– Les massacres dans le Sud entre dans les deux Logones, de novembre 1997 à mars 1998, leur caractère ethnique, le rôle d’Idriss Déby dansces massacres.

– Les membres de sa famille assassinés.

– Comment Idriss Déby s’est arrangé, avec sa famille, pour faire main basse sur la rente pétrolière et sur les autres rentes tchadiennes.

– Le pillage des cotonculteurs.

– Les trafics (fausse monnaie, drogue, armes) dans lesquels sont impliqués Idriss Déby et sa famille.

– Ses longs mois d’emprisonnement.

– Déby et la France.

Marie-Hélène Aubert

Députée Verte. Membre de la Commission des Affaires étrangères. Enseignante.

A présidé la mission d’information sur le rôle des compagnies pétrolières. S’est rendue au Tchad à ce titre.

A évoqué :

– Le régime tchadien, en matière de prédation et de droits de l’homme.

– L’aggravation de la situation du fait de l’enjeu du pétrole.

– Le rôle de la France dans la prévention ou la facilitation des crimes économiques et politiques du régime Déby.

– Comment Idriss Déby s’est arrangé, avec sa famille, pour faire main basse sur la rente pétrolière et sur les autres rentes tchadiennes.

– Son opinion sur le combat mené par Ngarléjy Yorongar.

– Ce qu’elle pense du travail de Survie, et de Noir silence.

André Barthélémy

Militant associatif, président d’Agir ensemble pour les droits de l’Homme. L’un des meilleurs connais­seurs de la réalité des droits de l’homme en Afrique. Il a effectué plusieurs missions au Tchad. Il y compte beaucoup d’amis parmi les défenseurs des droits de l’Homme, si exposés en ce pays.

A évoqué :

– Ce qu’il sait des crimes d’Idriss Déby, sous Hissène Habré et depuis 1990, tout spécialement les assassinats et la pratique de la torture.

– Les persécutions des défenseurs des droits de l’Homme notamment le sort de son ami assassiné Me Behidi.

– Le jeu de la France à la commission de l’ONU sur les droits de l’Homme lorsqu’il s’agit du Tchad.

– Ce qu’il pense du travail de Survie sur le Tchad, et en général.

Koti Yacoub Hisseine

53 ans. Administrateur civil. Ancien secrétaire d’État à l’Agriculture.

Président du Conseil national pour le redressement du Tchad.

Venu témoigner depuis le Bénin, où il est exilé.

A évoqué :

–Les assassinats et tortures commis par Idriss Déby, les membres de sa famille et ses affidés.

– Les massacres commis par Idriss Déby à N’Djaména en 1980 et dans les Logone en 1984.

–D’autres massacres à caractère ethnique ou clanique commis depuis 1990.

Dobian Assingar

Président de la Ligue tchadienne des Droits de l’Homme.

A évoqué :

– “Septembre noir”, le rôle d’Idriss Déby dans ce massacre et son caractère ethnique.

– Le massacre des ressortissants du Ouaddaï durant l’été 1993, et la « mise à sac » concomitante.

– Le massacre « indicible » d’août 1994 dans le Logone occidental.

– Les massacres dans le Sud entre dans les deux Logones, de novembre 1997 à mars 1998, leur caractère ethnique.

– Le pillage des cotonculteurs.

– Les autres exactions du régime.

– Le traitement réservé aux défenseurs des droits de l’Homme.

– La qualification d’Idriss Déby d’« assassin invétéré ».

– Ces qu’il pense du travail de Survie, et de Noir silence.

Issa Karam Ibrahim

28 ans. Capitaine de l’armée tchadienne. Ancien membre du Groupement de sécurité présidentielle.

A évoqué :

– Les assassinats et tortures commis par Déby ou ses fidèles dont il a été témoin.

– La répression de début 1998 dans les Logones.

– La mort le chef rebelle Laokein Bardé ?

– L’implication du clan Déby dans le trafic de fausse monnaie.

– La raison de sa décision de témoigner.

Antoine Bangui

67 ans. Ancien ambassadeur, puis leader du Mouvement pour la Rénovation du Tchad, emprisonné durant 3 ans sous Tombalbaye. Fonctionnaire international (UNESCO) jusqu’en 1993.

L’un des leaders de l’opposition démocratique. A publié à L’Harmattan Tchad : Élections sous contrôle ?

A évoqué :

– “Septembre noir”.

– Les massacres dans les deux Logones, de novembre 1998 à mars 1999. Leur caractère ethnique.

– Les crimes contre l’humanité commis par le régime d’Idriss Déby entre 1990 et 1997.

– Idriss Déby assassin invétéré.

– Déby et l’argent public. Le remplacement à la BTD de l’intègre Constance Djerang Kobo par Idriss Outman.

– La France et la démocratie au Tchad.

– Ce qu’il pense du travail de Survie, et de Noir silence.



Pius Njawe

43 ans. Fondateur et directeur du Messager (Douala, Cameroun).

L’un des plus célèbres journalistes africains, lauréat de nombreux prix internationaux. “Héros mondial de la liberté de la presse” (mai 2000, Institut international de presse). Embastillé par Paul Biya entre décembre 1997 et octobre 1998.

Enseigne pour quelques mois le journalisme dans une université américaine.

A évoqué :

– Le rapport à son incarcération avec l’enjeu du pétrole tchadien. Comment il a payé pour avoir démystifié le discours de la « démocratie apaisée », au Cameroun, au Tchad et en Afrique francophone.

– Idriss Déby « assassin invétéré » et complice d’un trafic de fausse monnaie.

– Comment la France peut soutenir des régimes comme ceux de Paul Biya et d’Idriss Déby.

– En tant qu’Africain et journaliste, ce qu’il pense des ouvrages de F.X. Verschave.



La partie civile n’a pas présenté de témoins.





Mercredi 7 mars à 9 h : la plainte d’Omar Bongo était à l’ordre du jour.



Le principal enjeu de ce procès est de montrer qu’Idriss Déby dirige bien une « démocrature prédatrice », c’est-à-dire une autocratie prédatrice légitimée par la fraude électorale, avec l’appui massif d’un large éventail de la classe politique française. Et qu’il fonctionne comme un « parrain » de la Françafrique.



Les témoins de la défense
Jean-François Médard


Professeur honoraire d’université, spécialiste de la corruption en Afrique.

A évoqué :

– Les mécanismes de la corruption franco-africaine, pétrolière notamment.

– La place du Gabon et d'Omar Bongo dans ces mécanismes.

– En tant qu'universitaire africaniste, ce qu’il pense du travail de François-Xavier Verschave et de Noir silence.

Laurence Dequay

Journaliste à Marianne. Co-réalisatrice du documentaire sur Elf diffusé par Arte.

A évoqué :

– L’argent du pétrole gabonais.

– Comment il se partage, entre Bongo et ses amis français.

Mongo Béti

Ecrivain camerounais. Pionnier du décryptage des relations franco-camerounaises.

A évoqué :

– La Françafrique et le pétrole.

– L'argent du pétrole du Gabon.

– Bongo parrain régional et propriétaire de l’Etat du Gabon.

Jean-François Dupaquier

Ancien rédacteur en chef de L’Événement du jeudi. Directeur gérant de L’Écho Le Régional.

A évoqué :

– Son expérience sur la façon dont Omar Bongo achète le silence de la presse.

– En tant que journaliste, ce qu’il pense du travail de François-Xavier Verschave et de Noir silence.

Daniel Um Nyobé

Informaticien. Orphelin du grand leader indépendantiste camerounais Ruben Um Nyobé.

A évoqué :

– Les hommes avec lesquels la France a martyrisé (plus de cent mille morts) le mouvement indépendantiste camerounais.

– La transposition de ces mêmes hommes (Delauney, Maîtrier, Conan) dans la répression au Gabon après la tentative de renversement du régime néocolonial M'Ba-Bongo.

– Ce que pensent les héritiers des leaders de l'indépendance africaine du travail de Survie et F.X. Verschave.

Jean-Arnold de Clermont

Président de la Fédération protestante de France.

A évoqué :

– S’il était possible de ne pas se taire par rapport au sort réservé à l'Afrique.

– Comment il a cherché à réagir face aux agressions qu'elle subit, au Congo-Brazzaville par exemple.

– La nécessité et l’utilité du travail accompli par Survie . Ce qu’il pense de Noir silence.

Claude Angeli

Directeur de la rédaction du Canard enchaîné. Auditionné par la mission d’information sur le rôle des compagnies pétrolières (1999).

A évoqué :

– Ce que fait Omar Bongo avec l’argent du Gabon.

– Le manque de crédibilité à accorder aux élections présidentielles gabonaises de 1993 et 1998.

– Ses liens de complicité avec la classe politique française.



La partie civile n’a pas présenté de témoins ni posé de questions aux témoins présentés.





Les plaidoiries


1/ La partie civile (elles ont duré plus de trois heures)



Maître Brossolet, Maître Dior Ndiagne et Maître Vergès se sont attachés chacun leur tour à mettre à mal l’ensemble des témoins que nous avons présentés ainsi que les documents que nous avons versés au débat. En substance, leurs plaidoiries avaient pour but de montrer la mauvaise foi de FX. Verschave. Ce qu’ils ont fait en précisant qu’au vu de ces trois jours il était clair que les sources de Verschave n’étaient pas sérieuses, qu’il était malhonnête dans sa démarche, qu’il n’avait jamais mis les pieds en Afrique ce qui est embêtant, selon eux, pour quelqu’un qui prétend apporter des informations sérieuses sur la situation de certains pays africains, et compte-tenu des informations graves qu’ils portent à l’encontre des trois chefs d’Etat en question.

Maître Dior Diagne a conclu sa plaidoirie en affirmant qu’elle avait de sérieux doutes sur le fait que M. Verschave verse réellement ses droits d’auteur à son association, prétendant que son intérêt était purement financier. En bref, « qu’il se remplissait bien les poches au passage » !! (sic)

Quant à Maître Vergès, il a notamment affirmé que nos témoins étaient plus que douteux, comme l’ensemble du travail de FXV, et a également affirmé que l’un des témoins du procès sur le Tchad, Issa Karam Ibrahim, était un menteur et n’avait certainement jamais appartenu à l’armée tchadienne. Il a par ailleurs largement axé sa plaidoirie sur le caractère prétendument raciste des écrits de FX Verschave et a poussé le vice au point de comparer Noir silence au Protocole des Sages de Sion.





2/ Le réquisitoire du Procureur Général



Il s’est dans un premier temps attaché à montrer qu’il n’y avait pas d’incompatibilité entre l’article 36 de la loi de 1881 du code pénal et les articles 6 et 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.

Il a par ailleurs rappelé que selon la jurisprudence concernant l’article 36, il incombe à la partie civile de démontrer la mauvaise foi du prévenu. Le Procureur, sans demander explicitement la relaxe et au vu des trois jours de débat, a invité le Tribunal à accorder le bénéfice de la bonne foi exonératoire à F. X. Verschave.



3/ Les plaidoiries de la défense



Francis Nthepe a plaidé sur les enjeux du procès pour l’Afrique et les africains. Un Tribunal français allait-il faire subir aux victimes de ces dictatures un deuxième viol, une deuxième mort ?

Vincent Toledano a axé la sienne sur l’aspect juridique : c’est-à-dire l’incompatibilité de l’article 36 avec les articles 6 et 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Il a conclu sa plaidoirie cependant en soulignant que le travail de F. X. Verschave est celui d’un citoyen, d’un militant, qui ne peut être soumis aux mêmes exigences qu’un journaliste. Par ailleurs, condamner les publications d’une organisation associative reviendrait à l’empêcher d’exercer les prérogatives inscrites dans ses statuts.

Antoine Comte et William Bourdon ont plaidé eux sur le fond.

M° Bourdon a introduit sa plaidoirie en signifiant son indignation face à l’attitude adoptée par les avocats des plaignants à l’égard de nos témoins : mépris, indécence et agressivité on,t ainsi prévalu lors de l’interrogatoire de tous les témoins.

Il a rappelé l’enjeu moral de ce procès et invité le Tribunal à anticipé un déjugement inévitable de leur décision par la Cour européenne des Droits de l’Homme, qui conclurait immanquablement à l’incompatibilité du jugement français avec la Convention européenne des Droits de l’Homme (CEDH). Il a ajouté qu’une proposition de loi, visant à abroger l’article 36, allait être déposée par un groupe de députés français. Le juge Montfort allait-il être le dernier à condamner un auteur sur la base d’un article de loi désuet ? La relaxe demande certes un réel courage, et M° Bourdon a signifié sa confiance en celui du Tribunal.



La partie civile qui n’a versé qu’un seul document au dossier et présenté que 3 témoins, tous parents de Denis Sassou Nguesso, a tenté d’utiliser contre nous les documents que nous avions fournis. Antoine Comte a récusé cette manœuvre et interpellé le tribunal sur la légitimité des plaignants à construire leur démonstration sur la base de nos pièces. Il a rappelé l’histoire, éclairante, de l’utilisation de l’article 36. En effet, ont eu recours à cette disposition Hitler, Mussolini, Duvalier, entre autres. L’article 36 serait donc l’instrument parfait pour « blanchir » les pires dictateurs.



La séance s’est conclue par une prise de parole improvisée des prévenus visiblement meurtris par la teneur des plaidoiries de la partie civile, insultantes, clairement diffamantes et calomnieuses. FX Verschave, a simplement tenu a exprimer son indignation face à la qualification de malhonnêteté qui lui a été attribuée. Il a par ailleurs tenu à dépersonnaliser le procès : en le condamnant, le Tribunal condamnera aussi, et surtout, Survie et ses militants, français et africains.

A travers l’histoire personnelle de ses deux oncles, Laurent Beccaria a évoqué la différence entre la morale et la raison d’Etat et prié le Tribunal à soutenir la démarche d’Antigone plutôt que celle de Créon. Il a d’autre part révélé que l’un de ses oncles avait été l’une des victimes de l’attentat du DC 10 d’UTA et qu’il nourrissait peu d’espoir dans la recherche de la vérité sur ce tragique épisode.



Le président du Tribunal a fixé le délibéré au mercredi 25 avril 2001.



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