LE RENOUVEAU 351
DU MERCREDI 15 MARS 2000

Organe d'information du PRD

Diffusion par l'ARDHD
Directeur de publication : Daher Ahmed Farah
Rédaction - Administration :
Edité par la Commission Communication du Parti
Avenue NASSER tel :35 14 74 B.P : 3570
Tirage : 1500 exemplaires . Dépôt Légal N°365

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LE RENOUVEAU

N° 351 DU MERCREDI 15 MARS 2000


EDITORIAL



DE RETOUR, LE RENOUVEAU VOUS SOUHAITE BONNE FÊTE



Ca y est, le Renouveau, votre fidèle hebdomadaire, qui depuis sa création au début d'octobre 1992 (sa première édition date du 7 octobre 1992 ) a été toujours présent au rendez-vous du jeudi matin avec ses aimables lecteurs et lectrices que vous êtes, votre journal préféré donc vous revient. Il sort de longs mois de silence forcé, suspendu d'abord pour douze mois puis pour six mois par la justice du régime en place dans ce pays.


Souvenez-vous, c'était le 28 août, par une après-midi caniculaire, le directeur de publication du Renouveau et président du Parti Renouveau Démocratique (PRD), Monsieur Daher Ahmed Farah, était arrêté par la gendarmerie, placé en garde à vue dans les locaux poussiéreux et pesants de chaleur de la fameuse Section de Recherches et de Documentation (SRD). En même temps que le Général à la retraite Ali Mehidal Waiss, co-directeur de publication du mensuel le Temps. Dès le lendemain, il s'entendait signifier le tarif : 12 mois d'emprisonnement ferme, un million de nos francs d'amende pour DAF et 12 mois de suspension pour le Renouveau. Ali Mehidal Waiss, lui, écope de huit mois d'emprisonnement ferme, un million de nos francs d'amende et huit mois de suspension du mensuel le Temps.

Mêmes chefs d'accusation contre les deux directeurs de publication et les deux publications : diffusion de fausses nouvelles et atteinte au moral des forces armées. Directement en cause : des articles parus dans les dernières éditions des deux journaux qui rendaient compte des derniers combats au nord entre le Front pour la Restauration de l'Unité et de la Démocratie (FRUD) dirigé par le président Ahmed Dini Ahmed et les troupes gouvernementales. Ils évoquaient surtout la destruction d'un hélicoptère militaire et la mort de ses équipage et passagers, publiant la version du FRUD qui affirmait avoir abattu l'appareil et celle du gouvernement qui concluait à l'accident technique avant même les résultats de l'enquête par lui diligentée.

Le jugement rendu par la chambre correctionnelle du tribunal de première instance restera comme un chef d'œuvre du genre dans les annales judiciaires. Il condamnera sans convaincre. Il mordra en mugissant, sans motiver le moins du monde. Un coup de maître, comme on l'aime bien dans les venelles enkhatées du pouvoir .

Le très fort Maître Djammen Nzepa du barreau de Toulouse (il est d'origine camerounaise) , venu défendre le Renouveau et le Temps au titre d'Avocats Sans Frontières, ne se privera point , en audience d'appel, de dire sa stupeur. Au cours de sa brillante plaidoirie, il démontrera qu'aucun des deux chefs d'accusation n'est établi du point de vue du droit et demandera la relaxe. Il ne sera pas pour autant suivi : le silence forcé du Renouveau et du Temps ne sera écourté que de quelques mois pour se fixer à six mois. Triste jour pour le droit et la liberté. Autres cieux, autres pratiques.

Au terme de trois mois et demi de triste détention dans la sinistre prison de Gabode, les directeurs de publication du Renouveau et du Temps " bénéficieront " d'une remise de peines et recouvreront la liberté. Pas les journaux, qui eux savoureront jusqu'à la dernière seconde le séjour au sanctuaire du silence forcé si apprécié d'un système suceur qui n'a rien à envier à la plus avide des sangsues.

Vous l'avez deviné, le régime, sous des prétextes éloquemment grossiers, cherchait seulement à museler, à bâillonner la presse d'opposition. Il n'aime point la plume, surtout si elle est libre. Pas plus qu'il n'apprécie la cloche qui ne s'avise pas d'émettre le bon son. A l'aune de ses standards, s'entend. Hors du culte du prince, point de salut.

Aura-t-il la réussi ? Rien n'est moins sûr. Car, d'abord, la période de silence aura brui de mille sons, grâce notamment à Internet dont la magie aura enfanté notre confrère le bien nommé Liberté. Un empêcheur que cet Internet ! Qui trouble tant nos tyranneaux, et fait enrager nos roitelets. C'est, transposé dans l'ordre de la liberté d'expression, l 'arme nucléaire qui brutalement relègue dans la nuit des temps l'arsenal conventionnel des tyranneaux de tout poil.

En outre, le Renouveau ne se laisse pas impressionner par les agissements moyenâgeux du régime. Il reprend le flambeau de la lutte et vous promet de faire honneur à votre confiance. Dans la mesure de ses maigres moyens et au rythme de sa pastorale persévérance.

De nouveau, bonne fête de l'Aïd-El-Adha donc, et bienvenus à bord...


POLITIQUE



Opposition Armée-Gouvernement :


Un Accord inscrit dans l'ordre des choses


Un accord de paix est intervenu entre le Front pour Restauration de l'Unité et de la Démocratie (FRUD) dirigé par le président Ahmed Dini Ahmed et le gouvernement de Monsieur Ismaël Omar Guelleh. C'était le 7 février dernier que le texte de cet "accord cadre de reforme et de concorde civile " était signé entre les deux parties à Paris en France.


Cet accord, qui a peut-être surpris tous ceux et toutes celles que la rhétorique moyenâgeuse du régime avait habitués à des prises de position radicales au sujet de la guerre civile au nord et au sud ouest du pays, où le pouvoir claironnait avoir rétabli la paix depuis les accords d'Ab'a du 26 décembre 1994, cet accord donc ne pouvait aucunement étonner l'observeur averti de la situation nationale. Il s'inscrit en réalité dans l'ordre des choses.

La situation de notre pays, n'en déplaise aux thuriféraires du régime et autres courtisans de bas étage, ne fait qu'empirer à tous points de vue. Politiquement, avec la logique du tout verrouillage et du tout répressif qui a trouvé ses limites. L'on ne peut en effet continuer, sans dommages majeurs, à bâillonner indéfiniment tout un peuple, entretenir la discorde nationale et cultiver le langage des armes au détriment du nécessaire dialogue. A la guerre civile, le régime a opposé quelques arrangements avec une faction alimentaire du FRUD, ce qui a donné lieu aux prétendus accords d'Ab'a ; il a éliminé les partis politiques d'opposition (Parti du Renouveau Démocratique et Parti National Démocratique) et a fait de même avec les syndicats de base et les deux centrales syndicales (l'Union Démocratique du travail et l'Union Générale des Travailleurs Djiboutiens), il a mis au pas la justice et les avocats, éliminé les défenseurs des droits de l'homme ; il a pratiqué à outrance l'emprisonnement et l'arbitraire, réprimé dans le sang (pas plus tard qu'au mois dernier un jeune homme tombait sous les balles des sbires du régime à Ali-Sabieh )... Economiquement, sa mal-gestion n'a abouti qu'à aggraver la situation. Les finances publiques asséchées pas la prédation, condamnent à la faillite des pans entiers de l'économie. Les entreprises travaillant pour l'administration disparaissent ; les salariés de l'Etat, de loin les plus nombreux, deviennent insolvables du fait des retards de solde atteignant les sept mois ; les investisseurs sont découragés par l'incertitude politique et le non-droit. Le paysage économique du pays s'en trouve défiguré. Quant à la situation sociale, elle se présente sous le signe éloquent de la misère : dans un pays qui vit du salariat et où l'Etat est le premier employeur et le premier agent économique, cela n'est d'ailleurs guère étonnant. Les relations extérieures, enfin, ne sont guère mieux loties: la fuite en avant exaspère les voisins et chaque jour qu'Allah fait apporte son pesant de doute quant à ce que le fils de Omar Guelleh appelle son plan de paix pour la Somalie.

Vous le constatez, le pouvoir autocratique aura tout essayé, tout expérimenté, pour durer et perdurer. Sans parvenir à ses fins Il ne pouvait d'ailleurs en être autrement à l'ère de l'Internet et du village planétaire où aucun pays ne peut vivre en marge du monde : la résistance nationale est grande, portée par la détermination populaire et le soutien international qu'elle suscite.

Les atteintes aux droits de l'homme, le lourd déficit démocratique, la mal-gestion des deniers publics et la mal gouvernance, une guerre civile aux lourdes conséquences qu'entretient l'intransigeance d'un pouvoir qui rejette le dialogue, tout a été désigné du doigt, péremptoirement dénoncé, preuves à l'appui. Condamnations et mises en garde se sont mises à pleuvoir. Le plan d'ajustement structurel s'est violemment heurté à la logique alimentariste qui préside au système gouvernemental. A L'ère où se traquent anciens dictateurs et autres tyrans en place, du " Pinochisme " décrié et d'affaires en tout genre, l'avenir se parait de sombres habits.

La politique de la facilité et du pouvoir confisqué s'est révélée sans issue. L'impasse s'installait.

Il fallait se rendre à l'évidence : le mode de gouvernement anachronique en cours depuis l'Indépendance avait vécu.

Il fallait donc réagir, cesser de faire les choses à contre-courant. Il fallait se résoudre au dialogue. D'où cet " accord-cadre " qui, comme son nom l'indique, se contente de jeter les bases du nécessaire dialogue national sans lequel, le régime le sait maintenant assez, il ne peut y avoir de salut. D'où également la reprise des relations rompues par le gouvernement djiboutien avec l'Erythrée, car là aussi la logique de la tension avait échoué qui devait faire place à l'apaisement...

Cet accord résulte donc de l'évolution des choses qui fait que le régime s'est affaibli et l'opposition renforcée par son unité et sa combativité.

Pour notre part, nous prenons bonne note de cette évolution, saluons l'accord de Paris, sans pour autant nous départir de notre vigilance...


JUSTICE


AFFAIRE ABDOULFATAH MOUSSA AHMED :

A travers le fils, atteindre le père.

Après neuf mois de détention préventive (il a été arrêté le 21 juin 1999 et la durée légale maximale de dépôt est de quatre mois en l'espèce) sous le chef d'accusation fallacieux de détournements de fonds, après maintes demandes de mise en liberté restées lettres mortes, après deux ou trois auditions seulement par le juge d'instruction, Monsieur Abdoulfatah Moussa Ahmed, fils aîné de Moussa Ahmed Idriss, a été condamné le 6 mars 2000 par la chambre correctionnelle du tribunal de première instance à trois ans d'emprisonnement ferme et à une somme de vingt trois millions de nos francs à payer à l'Etat de Djibouti.

Il lui était accusé d'avoir, dans la gestion du projet d'habitat social dit Barwaqo de Balbala ( 1000 parcelles de terrain à bâtir),gestion à laquelle il a été associé en sa qualité de chef de service des Domaines, détourné la somme de trente sept millions cinq cent trente sept mille deux cent quarante huit francs (37 537 248FD). Or, il parvenait sans peine, en grande partie dès sa garde à vue, à justifier ces fonds, preuves à l'appui. En clair, il démontrait qu' en ce qui le concerne ces deniers publics avaient servi, non à des fins personnelles comme il le lui était reproché, mais bien à la réalisation du projet. Il devenait donc rapidement clair qu'il n'y avait pas eu de détournements de fonds dans cette affaire.

Fort de cette évidence, son avocat, Maître Alain Martinet du barreau de Djibouti, adressait le 28 novembre 1999 une lettre démonstrative au juge d'instruction en charge du dossier, Madame Leila. Lettre que nous publions en fin de journal pour l'information de nos lectrices et lecteurs. Nous faisons de même, et dans le même souci, pour une note d'information de Monsieur Abdoulfatah Moussa Ahmed lui même ainsi que pour le communiqué de presse que l'Opposition Djiboutienne l'Unifiée (ODU) a publié après le verdict du 6 mars dernier.

Il va de soi, pour qui s'intéresse un tant soit peu à cette affaire, qu'au delà de ce prétexte au demeurant mal choisi puisqu'il ne tient pas, d'autres considérations sous-tendent l'acharnement du pouvoir contre ce jeune fonctionnaire diplômé en économie de l'université de Grenoble et inspecteur du trésor formé en France. A travers sa personne, c'est, lâchons-le, son père que le régime vise. Un père coupable d'être une figure indépendantiste et, surtout, de sa candidature à l'élection présidentielle du 9 avril 1999 dernier où toute l'opposition (armée comme civile) l'a soutenu. Un père coupable d'avoir remporté haut la main cette élection (qu'il ait été spolié de sa victoire n'enlève rien à son mérite) et de présider l'Opposition Djiboutienne Unifiée (ODU). Ce forum très populaire qui regroupe partis (PRD, PND), mouvements (FUOD, GDR) et personnalités politiques, donne des sueurs froides à un régime en mal de légitimité.

Telle est la vérité dans ce procès.

Mais que le pouvoir autocratique en place le sache :ses manoeuvres de pression à l'encontre du président de l'ODU et de sa famille sont vouées à l'échec. Comme elles le sont à l'encontre des autres leaders de l'opposition. Car, comme toujours, à l'agitation paniquée du fauve, nous opposons la force de nos convictions.

Le PRD condamne donc ce verdict politicard et exige la libération immédiate et sans condition de Monsieur Abdoulfatah Moussa Ahmed Idriss et de tous les autres prisonniers politiques encore détenus à la sinistre prison de Gabode.


Le président du parti, Monsieur Daher Ahmed Farah, et le Bureau National souhaitent une bonne fête de l'Aïd-El-Adha aux militants et sympathisants du PRD et de l'opposition ainsi qu'à l'ensemble des Djiboutiens et Djiboutiennes et des membres et de la communauté musulmane étrangère résidant à Djibouti.


Puisse la prochaine Aïd-El-Adha nous trouver en paix et réconciliés. Amin.



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